[Recension] « Les Grecs d’Istanbul, et le patriarcat œcuménique au seuil du XXIe siècle, Une communauté en quête d’avenir » : Un livre témoin et de témoignage !

Publié le: 28 Mai 2011

  

« Universitaires l’un et l’autre, les auteurs ont suivi les règles du métier… Leur objectif : dresser un état des lieux aussi précis que possible, mais également apporter un témoignage personnel sur la situation de la communauté à l’orée du XXI siècle. Ils s’attendaient à écrire un ouvrage couleur de cendre. Ils ont été eux-mêmes surpris de constater que leurs interlocuteurs, auxquels leur travail doit tant, étaient avant tout soucieux de faire passer un message d’optimisme » (Introduction du livre, p17)

 

 

 

Voici un livre témoin et qui témoigne ! « Les Grecs d’Istanbul », vient de paraître aux Editions du CERF. Spécialisée dans la publication de textes religieux, cette maison d’édition dominicaine s’est illustrée particulièrement dans l’inestimable Collection des « Sources Chrétiennes », portant sur les Pères de l’Eglise. L’amitié du CERF avec l’Eglise orthodoxe et les orthodoxes n’est plus à prouver ! Une amitié et une coopération à saluer ! Plusieurs livres d’auteurs orthodoxes y ont été publiés, dont ceux aussi de primats de l’Eglise orthodoxe. Ce fut le cas, plus particulièrement, dernièrement, en avril 2011, du livre de Sa Sainteté Bartholoméee 1e,  Patriarche Œcuménique de Constantinople, « A la rencontre du mystère ». Précédemment, en 2009, « La joie de la fidélité », livre de Sa Béatitude le Patriarche Daniel, primat de l’Eglise de Roumanie. Et avant lui, en 2006, le livre du Patriarche Cyrille 1erde Moscou, primat de l’Eglise de Russie, métropolite de Smolensk alors, « L’Evangile et la liberté ». Cette amitié se perpétue aujourd’hui par plusieurs publications orthodoxes dans le cadre de la Collection « Orthodoxie », codirigée par l’Archiprêtre Jivko PANEV (www.orthodoxie.com) et le père dominicain Hyacinthe DESTIVELLE (Cerf).

 

"Les Grecs d’Istanbul ", un livre coécrit par Méropi ANASTASSIADOU, chargée de recherche au CNRS et auteur de plusieurs travaux sur l’histoire des sociétés urbaines de l’Est méditerranéen (Grèce et Turquie) et Paul DUMONT, professeur à l’université de Strasbourg qui s’intéresse plus particulièrement à l’histoire de la Turquie moderne. Cet ouvrage, très bien documenté, est un travail de recherche mais aussi de terrain, fruit « de plusieurs années d’immersion [des auteurs]dans la vie de l’orthodoxie stambouliote ». Il s’illustre par sa double démarche analytique et prospective. Les coauteurs reviennent sur l’histoire contemporaine de la communauté grecque d’Istanbul tout au long du XXème siècle et s’attachent à recenser, avec précision et données chiffrées, les lieux de vie et de mémoire de la communauté et ses composantes socioculturelles. Au fil des pages, défilent diverses données historiques, sociologiques, culturelles, économiques et religieuses qui éclairent sous différents angles l’histoire contemporaine de cette communauté et de ses personnalités marquantes ainsi que celle du patriarcat Œcuménique, des institutions ecclésiales, pastorales, sociales, caritatives, culturelles qui lui sont rattachées. Les auteurs évoquent l’évolution démographique de cette communauté orthodoxe et les risques de déclin que l’effondrement démographique lui fait encourir. Ils situent l’évolution de cette communauté grecque d’Istanbul, qui se dit aussi communauté des « Romioi », référence à l’Empire romain d’Orient, constamment ballotée entre mémoire et avenir, dans le cadre des différents défis passés et présents qui sont les siens. Plusieurs pages évoquent aussi la composante « arabophone » du Hatay, vivant à Istanbul, visant plus particulièrement ces communautés « grec-orthodoxes » mais arabophones, originaires de la région d’Antioche qui dépendent du patriarcat orthodoxe d’Antioche mais sont sous la sollicitude pastorale du Patriarcat œcuménique. D’autres communautés orthodoxes sont visées aussi, roumaines, russes, bulgares qui viennent grossir la communauté orthodoxe d’Istanbul et qui proviennent d’émigrations plus récentes à caractère socioprofessionnel.

 

 

Les auteurs s’attardent particulièrement sur le rôle de « leadership patriarcal » du Patriarcat de Constantinople dans la conduite du destin et de l’avenir de cette communauté et la défense de ses droits, selon les époques. Ils évoquent la dynamique de redressement, engagée par les Patriarches Athénagoras 1er (1948-1972) (photo ci-dessus avec le Pape Paul VI) et Dimitrios 1er(1972-1991), en s’attardant plus particulièrement sur le rôle central du Patriarche Œcuménique actuel, Bartholomée 1er, (photo ci-contre à droite) dans l’amplification de cette dynamique et dans le repositionnement du Patriarcat non seulement sur la scène turque mais aussi sur le plan, pan orthodoxe et international. Ils analysent l’équation dans laquelle l’action du Patriarche Bartholomée se déploie, dans une double loyauté par rapport à l’Etat turc dont il est citoyen mais aussi et surtout, par rapport à la tradition, l’histoire, le rôle et mission du Patriarcat Œcuménique de Constantinople au niveau local, pan orthodoxe et international.

 

 

Y sont particulièrement évoqués aussi les efforts déployés par le Patriarche Bartholomée pour normaliser les relations avec les autorités turques et coopérer avec eux en bonne intelligence, mais aussi pour positionner le Patriarcat sur différents sujets emblématiques du monde d’aujourd’hui tels que le dialogue œcuménique, le dialogue islamo-chrétien, la protection de l’environnement, la paix mondiale etc. De même, une analyse intéressante et bien documentée évoque le projet de « turquisation de l’Eglise orthodoxe », projet « contrecarré » selon les auteurs mais aussi les relations avec l’Eglise de Grèce, les efforts pour la réouverture de l’école de théologie de Halki (photo ci-contre à gauche, et ci-dessous Halki avec le Patriarche Athénagoras et le corps professoral avant la fermuture) etc. Les auteurs reviennent également sur les fondements du soutien qu’apportent le patriarcat œcuménique et son primat, à l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne et les perspectives que cette adhésion (conjuguée avec l’amélioration des relations gréco-turques depuis 1999) impliquerait en termes de possible « rebond » de cette communauté dans le monde d’aujourd’hui et de demain.

 

 

 Un livre intéressant et triplement utile, construit à partir d’une volumineuse bibliographie, annexée à l’ouvrage avec une chronologie historique de 1923 à nos jours. Utilité en premier lieu, dans le travail de recensement des données du passé toujours présent, de cette communauté marquée par les vicissitudes de l’histoire et les difficultés qu’elle a connues tout au long du XXème siècle. Utilité en deuxième lieu, dans l’analyse à la fois objective et engagée, des données du présent, écueils et opportunités, faite par des auteurs, à la fois universitaires et personnes concernées au premier plan par l’histoire de cette communauté et son avenir. Utilité in fine, dans la capacité qu’ont les auteurs à entrevoir les différents « scénarii » de l’avenir de cette communauté, avec leurs lots d’avantages et d’inconvénients, de risques, menaces et d’opportunités, et de son possible rôle dans le monde d’aujourd’hui. La question centrale qui traverse le livre est celle, interrogative, d’un possible « rebond » de cette communauté qui pour beaucoup connaît plusieurs signes de déclin. Mais, comme le disent les auteurs, ils s’attendaient « à écrire un ouvrage couleur de cendre et ils ont été eux-mêmes surpris de constater que leurs interlocuteurs … étaient avant tout soucieux de faire passer un message d’optimisme ». Comment ne pas être sensible aux charmes et aux défis d’Istanbul qui se dégagent d’elle, des strates multiples de son histoire, de ses églises et de ses mosquées et minarets. Je l’ai vécue au plus profond de moi-même lors de chacune de mes visites à Constantinople. Dépassement continuel dans l’enracinement ! Un déroulé constant de la petite et de la grande histoire où tout, à la fois, est « passé », « présent » et « promesses d’avenir ».

 

Mes « Impressions d’Istanbul, voyage au cœur du Patriarcat de Constantinople » ont voulu traduire mes sentiments, en partage et communion. Ce livre, « Les Grecs d’Istanbul », instructif plus d’un égard, illustre parfaitement la force de cette ville et de ses strates historiques qui se parlent les unes aux autres comme un millefeuille ! Un livre témoin et de témoignage, à lire certainement pour se faire une idée personnelle du déclin et/ou du rebond de la communauté orthodoxe de cette ville et du rôle central déployé par le Patriarcat Œcuménique et son primat Bartholomée 1er, dans ce cadre !

 

Paris le 28 mai 2011 - Carol SABA 

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